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Les astrophysiciens ont généralement considéré que notre Galaxie
était une galaxie spirale ordinaire, au point d'utiliser ses propriétés
pour caractériser les modèles de simulation numérique permettant
de tracer la formation des galaxies depuis les premières origines
de l'Univers. Cette hypothèse est aujourd'hui remise en cause par
les derniers résultats d'une équipe d'astrophysiciens du laboratoire
GEPI (Galaxies Étoiles Physique et Instrumentation) de l'.
L'équipe d'astronomes (1) vient de comparer notre Galaxie aux autres
galaxies spirales (ou galaxies à disques). Elle démontre que pour
la Voie lactée, le contenu en étoiles et le rayon du disque sont
bien inférieurs à ce que l'on observe pour les autres galaxies.
Le halo de notre Galaxie est aussi exceptionnel: les étoiles qui
le composent sont particulièrement pauvres en éléments lourds. L'équipe
explique ces particularités par le fait que notre Galaxie a subi
très peu de rencontres ou de fusions avec d'autres galaxies depuis
les derniers 10-11 milliards d'années.
Aujourd'hui, la majorité des grandes galaxies sont des galaxies
spirales, sous la forme de grands disques en rotation autour d'un
bulbe de relative petite taille. Par exemple, notre Soleil est une
étoile du disque de notre Galaxie, la Voie lactée, tournant à une
vitesse de 220 km/s autour du centre galactique.
Les galaxies se caractérisent par des quantités fondamentales comme
la vitesse de rotation de l'ensemble des étoiles du disque autour
du centre, le rayon du disque et enfin le contenu en étoiles, communément
appelé « masse stellaire ». Il est assez aisé de mesurer ces quantités
pour les galaxies extérieures à la nôtre, car nous en avons une
vision globale. La difficulté pour faire ces mesures pour la Voie
lactée tient au fait que nous l'habitons: par exemple, l'extinction
par des poussières interstellaires peut cacher une partie de la
Galaxie et donc fausser les mesures. D'énormes progrès ont été réalisés
ces dernières années, avec notamment des mesures très détaillées
faites en proche et lointain infrarouge qui, elles, ne sont pas
affectées par les effets des poussières.
La Voie lactée se singularise par sa masse et son rayon
En comparant ces mesures avec celles qui ont été faites sur un ensemble
de galaxies proches, les astrophysiciens de l'Observatoire de Paris
ont réalisé à leur grande surprise que notre Galaxie était plutôt
particulière. En effet, pour une vitesse de rotation du disque donnée,
son rayon et sa masse stellaire sont deux fois plus petits que ceux
de la moyenne des autres galaxies. Ainsi, seulement 7% des galaxies
spirales voisines ont des propriétés semblables à la Voie lactée.
Par contre, la grande galaxie d'Andromède a des propriétés comparables
à celles des autres galaxies spirales.
L'environnement particulièrement intact de notre Galaxie
Les galaxies spirales ne contiennent pas seulement un disque et
un bulbe: elles sont aussi entourées par un halo de matière, généralement
connu pour contenir la matière invisible nécessaire à leur stabilité.
Ce halo, ou cet environnement, contient de la matière visible, comprenant
des étoiles, dont les propriétés sont particulièrement affectées
par les phénomènes de fusion entre galaxies. Par exemple, lorsqu'une
galaxie en absorbe une autre, les effets du choc sont tellement
violents que les régions environnantes sont considérablement affectées
par les débris de la collision, et de plus, enrichies par les nouvelles
étoiles naissantes suite à la fusion. À nouveau, la Voie lactée
est très particulière: son environnement contient uniquement des
étoiles âgées et peu enrichies en éléments lourds, contrairement
aux autres galaxies, notamment Andromède.
La Voie lactée est-elle particulièrement propice à l'apparition
de la vie ?
Nous savons par ailleurs que la Voie lactée n'a pas subi de fusions
importantes avec d'autres galaxies depuis près de 11 milliards d'années.
Nous savons aussi qu'Andromède a subi de nombreux phénomènes de
fusions dans un passé beaucoup plus récent (quelques milliards d'années).
Ces fusions récentes "polluent" l'environnement des galaxies par
du matériel dispersé ou par des étoiles nouvellement formées. En
générant de nouvelles étoiles, la masse stellaire et le rayon des
galaxies augmentent. Les propriétés particulières de la Voie lactée
– petit rayon de disque, faible masse en étoiles, étoiles peu enrichies
du halo -s'expliquent ainsi très bien par l'histoire exceptionnellement
calme de notre Galaxie.
L'absence de rencontres durant plus de dix milliards d'années avec
d'autres galaxies pourrait être une condition particulièrement favorable
à l'apparition de la vie. En effet, les collisions entre les galaxies
sont en général très violentes, et impliquent de très puissantes
émissions d'énergie (dont celles des supernovas) qui sont très nocives
aux molécules complexes qui sont à l'origine de la matière vivante.
(1) L'équipe est composée
de: François Hammer, Mathieu Puech, Laurent Chemin, Hector Flores
et Matthew Lehnert, GEPI-Observatoire de Paris, unité mixte de recherche
du CNRS, associé à l'Université Paris Diderot.
© Observatoire
de Paris
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