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18.05.08 Le changement climatique pourrait bouleverser la biologie des maladies infectieuses
 
Pendant 10.000 ans, les humains, les plantes, les animaux et les microbes de la planète Terre ont connu une période exceptionnellement longue de stabilité climatique. Or cette période s'achève au fur et à mesure que la montée du niveau des gaz à effet de serre, notamment le gaz carbonique, perturbe les fragiles relations établies entre ces formes de vies dans un environnement fiable.

Selon les membres du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), le réchauffement climatique est un fait indéniable, et la majorité de ce phénomène, au cours des cinquante dernières années, est imputable à des concentrations de gaz à effet de serre résultant probablement de l'activité humaine.

Les preuves tangibles de changements s'accumulent : augmentation de la température moyenne de l'air et de l'atmosphère, augmentation de la température des océans, fonte des neiges, diminution de la superficie et de l'épaisseur de la glace arctique, réduction des calottes glaciaires et montée du niveau des mers.

Une planète différente

'Nous avons déjà dépassé le seuil dangereux de concentration du gaz carbonique dans l'atmosphère', a déclaré James Hansen, directeur de l'Institut Goddard d'études spatiales de la NASA à New York, lors de la réunion annuelle de l'Institut américain des sciences biologiques (AIBS) sur le thème du climat, de l'environnement et des maladies infectieuses.

'Nous sommes déjà passés d'une concentration de gaz carbonique dans l'atmosphère de 280 parties par million (ppm, par volume d'air) à 385 ppm, et je pense que nous allons devoir la ramener à 350 ppm, si ce n'est moins', a déclaré M. Hansen, célèbre pour la déposition sur le changement climatique qu'il a faite en 1980 au Congrès et qui a déclenché une prise de conscience internationale du phénomène de réchauffement de la planète.

Au cours du siècle dernier, la température de la planète a augmenté en moyenne de huit dixièmes de degré centigrade. Au-dessus des terres, l'augmentation est de près de 1,4 degré, et les trois quarts du phénomène de réchauffement ont eu lieu au cours des trente dernières années.

Durant cette même période de 30 ans, a ajouté M. Hansen, les isogéothermes - les lignes qui, sur une carte, marquent une température moyenne donnée - se sont rapprochées des pôles à raison de 56 kilomètres par décennie. Une telle augmentation des températures, ainsi que les phénomènes d'urbanisation et de croissance démographique, déplacent un large éventail d'animaux, de plantes et de microbes qui, s'ils ne s'adaptent pas, sont voués à la disparition.

'En fait, a dit M. Hansen, au fur et à mesure que les isogéothermes montent, nous sommes en train de bouter des espèces hors de la planète.' Et si on laisse doubler ou tripler le niveau actuel de gaz carbonique, 'nous allons engendrer une planète complètement différente'.

Le climat et la grippe

Cet aspect du changement climatique présente également une menace pour la santé publique : inondations, vagues de chaleur et sécheresses provoquées par l'augmentation des températures, et perturbations au niveau des relations entre les insectes vecteurs de maladies et leurs hôtes.

'Les changements climatiques sont souvent l'agent de l'émergence d'une infection', a affirmé Stephen Morse, professeur d'épidémiologie à la Mailman School of Public Health de l'université Columbia lors de la conférence de l'AIBS.

Les maladies infectieuses émergentes sont, selon M. Morse, qui a inventé ce concept en 1989, des infections nouvelles qui affectent une population ou des infections qui ont existé mais qui se propagent rapidement sur le plan de l'incidence et de la zone géographique. Des exemples de telles maladies sont le VIH/sida, le syndrome pulmonaire à hantavirus et le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS).

Un village mondial

Les virus de la grippe, y compris ceux de la grippe aviaire, s'infiltrent facilement au sein des populations humaines. Mais malgré leurs apparitions régulières, on en sait si peu sur eux que les chercheurs ont du mal à prédire comment le changement climatique risque d'affecter la maladie. Les changements saisonniers sont l'une des inconnues.

'Dans les zones tempérées (comme aux États-Unis et en Europe), nous considérons la grippe comme une maladie hivernale, a dit M. Morse. Dans les zones tropicales, elle connaît deux pointes : en hiver et en été.'

Dans les tropiques, la situation est un peu plus compliquée, et certains affirment que la grippe y sévit toute l'année. Dans certaines régions, il semble y avoir deux périodes de pointe, à savoir la saison sèche et celle des pluies.

'Ce que nous considérons comme une maladie hivernale se porte très bien dans des conditions chaudes et humides. Ce ne sont donc pas le froid et la sécheresse de l'hiver qui facilitent la propagation de la grippe. Il y a autre chose.' Un climat global plus chaud pourrait modifier la nature des grippes saisonnières et affecter la propagation de la maladie dans le monde.

En ce qui concerne la grippe aviaire, le réchauffement climatique pourrait modifier les trajectoires des oiseaux migrateurs soupçonnés d'infecter les oiseaux domestiques avec le virus H5N1 très pathogène. De tels changements pourraient influencer les relations entre le gibier d'eau et la volaille ainsi qu'entre les éleveurs et la volaille, et avoir des répercussions sur l'exportation et l'importation de volailles dans le monde entier.

'Nous vivons désormais dans un village mondial, et les microbes en profitent pleinement, a dit M. Morse, comme nous l'avons vu dans le cas du VIH et du SRAS.'


© Cheryl Pellerin (rédactrice USINFO)


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