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Une équipe internationale de scientifiques comprenant un chercheur
du (UMR CNRS/Université de Provence)
vient de détecter une galaxie en train de se faire « dénuder» de
son gaz et de ses étoiles. Cette malheureuse galaxie s’est rapprochée
un peu trop près d’un amas de galaxies et a subi les effets de cet
environnement hostile. L’étude de cette galaxie, effectuée à partir
d’observations réalisées avec le télescope Hubble et une kyrielle
d’autres télescopes et satellites, apporte un nouvel éclairage sur
le mystérieux et long mécanisme de transformation des galaxies au
sein des amas de galaxies et pourrait permettre d’expliquer le processus
de formation des millions d’étoiles isolées au centre des amas.
Dans l’Univers local, c'est-à-dire aujourd’hui, près de la moitié
des galaxies sont pauvres en gaz avec une apparence généralement
« elliptiques » : constituées de vielles étoiles et n’en formant
plus de nouvelles. L’autre moitié est composée de galaxies riches
en gaz généralement en forme de « spirales » ou « irrégulières »
: plus jeunes, formant des étoiles, elles se trouvent plutôt dans
les régions les moins denses de notre Univers.
Toutefois, les observations de l’Univers alors qu’il n’avait que
la moitié de son age actuel (1) révèlent une toute autre répartition.
A cette époque, les galaxies spirales et les galaxies irrégulières
étaient largement plus nombreuses. L’importante population de galaxies
elliptiques dans notre Univers local ne peut à priori s’expliquer
que par une transformation des galaxies spirales et irrégulières
au cours du temps. Une telle évolution s’étalant cependant sur des
milliards d’années, il est impossible de l’observer à l’échelle
d’une vie humaine.
Une équipe internationale de scientifiques, pilotée par Luca Cortese
de l’Université de Cardiff (Grande Bretagne), a néanmoins pu observer,
grâce au télescope spatial Hubble, une des séquences les plus significatives
de ce processus comme cela n’avait jamais été fait auparavant. En
étudiant l’amas de galaxies Abell 2667, les chercheurs ont observé
une galaxie spirale très curieuse qui le traversait avec une vitesse
d’au moins 1000 kilomètres par seconde (3,6 million de Km/h),accélération
due au très important champ gravitationnel de cet amas. En croisant
les résultats de cette observation avec ceux obtenus à partir de
plusieurs télescopes au sol et dans l’espace (3), ils ont ainsi
pu apporter d’importantes précisions sur le mécanisme de la transformation
en cours. Cette galaxie unique, située à 3,2 milliards d’années-lumière
de la Terre subit les effets dévastateurs, d’une part de l’énorme
champ gravitationnel d’Abell 2667 qui résulte de la contribution
combinée de sa matière noire, de son gaz chaud et de ses centaines
de galaxies, et d’autre part de la pression dynamique du gaz chaud
intra-amas.
« A cours de ce formidable plongeon au coeur d’Abell 2667, les étoiles
et le gaz de cette galaxie sont littéralement éjectés, donnant naissance
à une longue traînée de nuages de gaz bleu lumineux et de jeunes
étoiles, ressemblant à une queue de comète. C’est d’ailleurs pour
cette raison que nous l’avons surnommée la « galaxie-comète » explique
Jean Paul Kneib chercheur au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille
et membre de cette équipe scientifique.
En même temps, les forces du champ gravitationnel d’Abell 2667 déclenchent
une telle agitation au sein la « galaxie-comète » qu’elles génèrent
une très importante formation d’étoiles. Les jeunes étoiles dans
les parties externes de la galaxie sont alors à leur tour aspirées,
et deviendront probablement des étoiles solitaires peuplant le milieu
intra-amas des parties centrales. Ainsi Abell 2667 est en train
de vider cette galaxie de toute sa jouvence, la vieillissant prématurément
et laissant « sans toit » les millions d’étoiles expulsées. A terme,
cette galaxie n’hébergera plus que de vieilles étoiles. Vidée de
tout son gaz et de toute sa poussière elle ne pourra probablement
plus donner naissance à de nouvelles étoiles.
Grâce à cette découverte, cette équipe scientifique nous apporte
de précieuses information sur certain des mécanismes qui conduisent
à la transformation des galaxies spirales riches en gaz en galaxies
pauvres en gaz. En effet, une seule autre observation de ce phénomène
avait pu été réalisée précédemment mais elle portait sur la fin
de ce même processus. Avec la « galaxiecomète » nous obtenons pour
la première fois une information sur une des premières étapes de
ce processus de transformation qui ne dure probablement que quelques
centaines de millions d’années, étape au cours de laquelle une importante
formation d’étoiles est déclenchée.
1
Observer des objets lointains revient à observer dans le passé et
en mesurant la distance qui nous sépare de ces objets on peut savoir
à quel âge de l’Univers correspond l’image qui nous parvient.
2
Le Very Large Telescope de lESO, les télescopes Keck,
le télescope spatial SPITZER et le Chandra X-Ray
Observatory de la NASA
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