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Lors d'un entretien qu'a bien voulu nous accorder David Mimoun
de l' et membre de l'équipe de Ph. Lognonné,
Principal Investigateur (PI) du projet d'un sismomètre martien,
nous faisons le point sur l'intérêt scientifique de déposer un sismomètre
sur Mars , ainsi que sur les défis techniques à vaincre avant de
l'embarquer sur une sonde. (avril
2006, mis à jour novembre 2008)
En 2005, l' a décidé d'ajouter un paquet géophysique
d'environ 20 kg à la mission ExoMars. (Initialement, seule la suite
d'instruments était prévue). Ce paquet géophysique,
comprenant des instruments d'étude de l'environnement, sera réparti
sur la plate-forme d'atterrissage du rover. Parmi ces instruments
figure le sismomètre SEIS, dont le développement a été initié lors
de la mission NetLander du ,
aujourd'hui abandonnée.
Envoyer un sismomètre sur Mars est nécessaire si l'on veut connaître
la structure interne de la planète, étudier son activité géologique
actuelle et ainsi comprendre son histoire. Cela permet également
de faire de la planétologie comparée avec la Terre (mais également
Vénus et la Lune) de façon à mieux comprendre l'évolution des planètes
telluriques du système interne.
Rappelons que les astronautes des missions Apollo ont installé un
réseau sismique sur la Lune qui a fonctionné jusqu'en 1977 et que
la NASA a déjà envoyé deux sismomètres sur la planète rouge avec
les missions Viking. Malheureusement un n'a pas fonctionné ; l'exploitation
des données du second a montré que l'emplacement choisi pour installer
le sismomètre ne se prêtait pas du tout à l'étude de la structure
interne de la planète : l'instrument n'était pas en contact direct
avec le sol de sorte que seules des données du vent martien ont
été acquises.
Science
Après la Terre, Mars est la planète du Système Solaire que nous
connaissons la mieux. Nos connaissances de son environnement, son
atmosphère de et sa géologie de surface ont bien progressé grâce
aux dernières missions. La compréhension fine de son histoire passe
toutefois par la compréhension de sa structure interne, d'où la
nécessité de déposer un ou plusieurs sismomètres sur Mars.
Cet instrument va permettre de regarder " sous " la surface de planète.
Les profils de vitesse des ondes sismiques se propageant sous le
sol vont permettre en effet de 'voir' sa structure interne et d'obtenir
des informations significatives sur la taille, voire la composition,
des différentes structures internes de la planète (croûte, manteau
et noyau). À titre d'exemple, c'est grâce aux sismomètres que la
structure de la Terre a été déterminée : le noyau a été découvert
en 1906 et la graine en 1936.
Un sismomètre se différencie des radars sondeurs par sa capacité
à 'voir' ce qui se passe jusqu'au cœur de la planète. Suivant la
longueur d'onde utilisée, les radars ne peuvent pénétrer que les
premiers kilomètres sous la surface. Ainsi, le radar Marsis
de Mars Express, qui donne des images extraordinaires de la subsurface
de Mars en montrant des cratères enfouis depuis plusieurs milliards
d'années, ne nous donne toutefois des informations que sur les quelques
premiers kilomètres de la croûte martienne. En aucun cas il ne peut
nous renseigner sur son épaisseur et obtenir des informations sur
le noyau et le manteau, données qui déterminent l'évolution de la
planète.
Initialement le sismomètre sur lequel l'équipe de scientifiques
et d'ingénieurs de l' (IPGP) travaille était conçu dans
le cadre de la mission NetLander, un projet du CNES qui envisageait
de poser sur Mars un réseau de quatre petites stations de façon
à obtenir une image complète de la structure interne de la planète.
Mais, l'architecture de la mission retenue pour ExoMars ne permet
pas d'envisager l'envoi de plusieurs atterrisseurs : un seul sera
déposé à la surface de Mars, de sorte qu'il n'est pas possible d'avoir
une vision globale de la structure interne de la planète. Reste
que le retour scientifique attendu n'est pas pour autant négligeable
et plusieurs avancées significatives sont attendues :
Une des grandes interrogations des scientifiques est de savoir s'il
existe une activité sismique sur la planète. On a très longtemps
pensé que Mars était une planète en fin de vie, voire éteinte. En
raison de sa taille plus petite, la planète s'est refroidie plus
vite que la Terre de sorte que sa dynamo interne, due à la chaleur
accumulée pendant la phase d'accrétion a disparu plus vite que celle
de la Terre.
Mais les observations de Mars Express accréditeraient l'idée que
Mars est plus une planète en "fin de vie géologique" plutôt qu'une
planète "morte" géologiquement. En cause, la détection d'une activité
volcanique vraisemblablement récente sur les flancs d'Olympus Mons
et d'autres volcans martiens, survenue ces dernièrs millions d'années.
Malgré l'absence quasi certaine d'une tectonique des plaques active
sur Mars, les sismomètres devraient pouvoir enregistrer des tremblements
de Mars.
L'autre grand intérêt scientifique est de suivre les conséquences
d'un impact contre la surface de Mars.
Sous l'effet d'un séisme important la planète peut aussi se mettre
à vibrer comme une cloche. Si sur Terre il faut des séismes de magnitude
7, il faut sur Mars des séismes de magnitude 5.5 a 6 qui pourraient
avoir lieu tous les 2-3 ans...
Enfin, les scientifiques américains, au travers des recommandations
de leur comité scientifique (le MEPAG), ont eu aussi préconisé l'envoi
de sondes dotées de sismomètres dès 2013. ExoMars serait alors le
'précurseur' d'un réseau de stations martiennes ….
Technique
Le projet s'appuie grandement sur les études menées pour la mission
NetLander. Il est financé en grande partie par le CNES, mais il
réunit au sein d'un consortium Européen, des Instituts et des laboratoires
Suisses, Allemands, Néerlandais, et Anglais.
Si beaucoup de problèmes techniques sont à résoudre avant de finaliser
son architecture définitive, les points cruciaux de sa conception
sont bien entendu la miniaturisation de l'instrument de manière
à ce que sa masse soit compatible avec les contraintes d'emport
sur une sonde spatiale, l'optimisation de sa consommation d'énergie
, et sa résistance à l'environnement martien, ainsi qu'aux conditions
du voyage et de l'atterrissage.
Résistance à l'environnement
La résistance de l'instrument pose deux problèmes aux ingénieurs.
D'une part il doit résister aux conditions de l'atterrissage sur
Mars et être capable de résister à une accélération de 200 g pendant
20 millisecondes (c'est la spécification donnée par le CNES pour
la mission NetLander) IL faut noter qu'un sismomètre terrestre ne
résisterait pas un atterrissage similaire à celui des rovers MER
de la NASA, pourtant beaucoup moins contraignant.
D'autre part, ce type d'instrument est très sensible à la température.
Généralement, ils sont installés au fond d'une cave ou dans une
grotte où la température est stabilisée à environ 1 degré. Sur Mars,
les variations de température quotidienne attendues sont de plus
de 60 degrés. Les ingénieurs ont donc conçu un mécanisme
de compensation spécifique.
Miniaturisation
Un sismomètre terrestre de référence pèse environ 9 kg, sans compter
son système d'acquisition. Pour le sismomètre martien, il se limite
à 2 kg tout compris, avec des performances comparables …. Or, par
nature, plus un sismomètre est lourd et mieux il fonctionne ! On
comprend mieux la difficulté de la tâche des scientifiques pour
miniaturiser au maximum ce pendule mécanique.
Autre défi à relever, l'installation du sismomètre. L'échec du sismomètre
de Viking s'explique par la distance au sol du lander de la NASA
et le fait que la plateforme était relié au sol par des amortisseurs
!. Or, si l'on veut de bonnes mesures, ce type d'instrument doit
être en contact direct avec le sol, sinon les données enregistrées
seront fortement parasitées et difficilement exploitables. Les responsables
du projet planchent sur un système de déploiement de trois pieds
qui sortiraient de la plate-forme de façon à se coupler avec le
sol et sur lesquels reposerait le sismomètre.
+ d'info
(Synthèse à jour du
projet écrite par l'IPGP pour le CNES)
Spécial ExoMars
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- Le sismomètre martien ;
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