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Consciente que les retombées économiques de l'exploitation de l'espace
vont aller crescendo, la Russie ne veut pas rester dans l'ombre
des Etats-Unis. Et face aux ambitions chinoises et européennes (dans
une moindre mesure), le risque est réel pour la Russie de se trouver
isolée sur la scène internationale.
Attention, à bien mesurer nos propos. Il s'agit de prospective,
c'est-à-dire d'échéance à 20 ou 30 ans et non pas à moyen terme
où à l'évidence la Russie restera une puissance spatiale incontournable
et de tout premier plan pour les raisons que l'on connaît.
Devant les enjeux stratégiques et économiques qui se dessinent,
la Russie est consciente qu'elle aura beaucoup de mal à rester un
acteur de tout premier plan par ses seules capacités financières
et techniques. Pour faire face à cette situation, la Russie s'est
engagée dans une stratégie alternative qui vise à s'entourer de
puissances spatiales émergentes de façon à devenir incontournable
pour ces pays et profiter de retours industriels et technologiques
substantiels. Après l'Inde, le Brésil et la Chine, la Russie renforce
sa coopération avec la Corée du Sud. Puissance spatiale émergente
mais puissance économique avérée, la Corée du Sud vise à devenir
une puissance spatiale d'ici 2015.
L'accord bilatéral entre les deux pays prévoit la construction d'un
Centre spatial en Corée et la formation (entraînement) d'un astronaute
coréen en vue d'un séjour à bord de la Station spatiale internationale.
Mais ce n'est pas tout. Cet accord prévoit également une coopération
dans l'exploitation et l'utilisation de l'espace à des fins pacifiques.
Enfin, il jette les bases à la modernisation du système de lancement
coréen KSLV.
La ,
l'Agence spatiale coréenne, développe actuellement la famille de
lanceurs KSLV (Korea Space Launch Vehicle). Le KSLV-1 est un lanceur
qui repose sur l'étage russe Angara et capable de lancer de petites
charges utiles sur orbite basse. A partir du KSLV-1, il est prévu
de développer deux autres versions, bien plus puissantes et capables
de viser des orbites plus hautes.
Pour la Corée du Sud, cet accord s'inscrit dans une politique aux
enjeux plus terre à terre. D'ici 2015, ce pays veut devenir une
puissance spatiale. Mais, il n'est pas question pour autant de s'aventurer
dans l'espace autrement que par l'envoi de satcom ou de metsat.
Il s'agit avant tout de se garantir un accès à l'espace et de s'affranchir
de la tutelle des Etats-Unis dans le domaine militaire. Petite explication.
S'il nous apparaît évident que le régime en place en Corée du Nord
doit s'effacer, la Corée du sud est plus circonspecte. Devant les
déboires rencontrés par la réunification de RFA et de la RDA, la
Corée du Sud ne veut pas voir se produire un effondrement du régime
en place en Corée du Nord au risque d'affecter le pays bien plus
profondément que ne l'ont été les allemands de l'Ouest. D'où son
aide alimentaire massive.
Mais la menace que fait peser la Corée du Nord sur la région est
bien présente. A terme, Séoul veut se doter d'une infrastructure
spatiale militaire contre la Corée du Nord. Or, pour les Etats-Unis
et le Japon il n'est pas question que Séoul se dote de milsat au
risque de braquer un peu plus la Corée du Nord et déstabiliser la
région. D'où son besoin d'autonomie d'accès à l'espace.
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