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02.09.06 SMART-1 doit s'écraser sur la Lune
 
L'Europe peut désormais dire qu'elle aussi est allée sur la Lune. En effet, tôt le matin du 3 septembre (à 07h41 heure de Paris, selon les prévisions actuelles), la mission d'exploration du satellite SMART-1 de l'Agence spatiale européenne prendra fin lorsque ce dernier percutera la surface de l'astre lunaire.

L'histoire a débuté en septembre 2003, lorsqu'un lanceur Ariane-5 a décollé de Kourou, en Guyane française, pour placer la sonde lunaire SMART-1 de l'Agence spatiale européenne sur une orbite terrestre. Cette sonde automatique de petite taille pèse 366 kg et ressemble à un cube d'un mètre de côté, si l'on ne tient pas compte de ses panneaux solaires de 14 mètres d'envergure (repliés pendant la phase de lancement).

Après le lancement puis l'injection sur une orbite elliptique autour de la Terre, la poussée, faible mais constante, fournie par le moteur à propulsion électrique très innovant de SMART-1, qui expulse des ions de gaz xénon sous forte pression, a donné à la sonde une trajectoire en spirale autour de la Terre, afin qu'elle s'en éloigne de plus en plus, jusqu'à être capturée par la gravité lunaire, après un long périple d'environ 14 mois.

Pour couvrir les 385 000 kilomètres qui séparent la Terre de la Lune en ligne droite, la sonde a parcouru 100 millions de kilomètres en ne consommant que 60 litres de carburant grâce à son moteur remarquablement performant ! Après avoir été capturée par le champ gravitationnel lunaire en novembre 2004, la sonde, qui s'est placée sur une orbite elliptique autour des pôles de la Lune, a débuté sa mission scientifique en mars 2005. SMART-1 est, à l'heure actuelle, le seul satellite en orbite autour de la Lune, ouvrant la voie à la flotte de sondes lunaires internationales qui seront lancées à partir de 2007.

L'histoire touche désormais à sa fin. Dans la nuit du samedi 2 au dimanche 3 septembre, vous pourrez peut-être, avec un télescope suffisamment puissant, assister à un événement tout à fait exceptionnel. En effet, comme la plupart de ses prédécesseurs, SMART-1 terminera son voyage et son activité d'exploration lunaire en atterrissant de façon quelque peu brutale dans une zone baptisée le « Lac de l'Excellence », située au milieu de la région méridionale de la face visible de la Lune, à 07h41 heure de Paris (05h41 UTC), ou cinq heures avant s'il heurte une montagne non répertoriée. L'épilogue est proche

Après 16 mois d'activité scientifique en orbite elliptique autour des pôles lunaires (à une distance variant entre 300 et 3 000 km), la mission touche à sa fin. La sonde, dont le périlune est désormais inférieur à 300 km, va observer de plus près des cibles bien définies, avant de se poser à la surface de la Lune, de façon contrôlée (du moins en ce qui concerne le lieu et l'heure), et de mettre un terme à sa carrière.

« SMART-1 heurtera la Lune à une vitesse relative faible (2 km/s ou 7 200 km/h) et creusera un petit cratère mesurant 3 à 10 m de diamètre » explique Bernard Foing, Responsable scientifique du projet SMART-1, « comparable à ceux créés par des météorites de 1 kg sur une surface déjà très marquée par les impacts naturels ».

Les derniers instants qui précèderont cet impact seront suivis avec la plus grande attention par les contrôleurs de la mission depuis le centre de contrôle de l'ESA (ESOC), situé à Darmstadt, près de Francfort (Allemagne).

Dernières étapes de l'exploitation en vol de SMART-1

En juin, les contrôleurs de la mission SMART-1 de l'ESOC ont achevé une série de mises à feu complexes du propulseur, destinées à optimiser l'heure et le lieu de l'impact du satellite. Elles ont dû être réalisées par les propulseurs du système de commande d'attitude car le moteur ionique avait consommé tout son xénon en 2005.

Ces manouvres ont modifié le lieu et l'heure de l'impact, qui aurait dû se produire à la mi-août sur la face cachée de la Lune ; il est désormais prévu sur la face visible et les meilleures estimations actuelles indiquent qu'il devrait avoir lieu vers 07h41 heure de Paris (05h41 UTC) le dimanche 3 septembre.

« Les contrôleurs de la mission et les ingénieurs en dynamique des vols ont analysé les résultats de la campagne de manouvres afin de confirmer et d'affiner cette estimation », explique Octavio Camino-Ramos, Responsable de la conduite des opérations du satellite SMART-1 à l'ESA/ESOC. « Les manouvres d'ajustement finales prévues le 25 août pourraient encore modifier l'heure définitive de l'impact », ajoute-t-il.

De grands télescopes au sol, utilisés avant et pendant l'impact, permettront de faire des observations, avec plusieurs objectifs :

- étudier la physique de l'impact (matériaux éjectés, masse, dynamique et énergie) ;
- étudier la chimie de la surface lunaire en analysant le rayonnement spécifique (le « spectre ») émis par les matériaux éjectés ;
- contribuer à l'évaluation technologique de la mission : étudier le comportement du véhicule dans ces circonstances permettra de mieux préparer de futures expériences d'impact (par exemple, pour des satellites destinés à intercepter des météorites menaçant la Terre).

Pourquoi SMART-1 est-il si exceptionnel ?

Le satellite SMART-1 comporte des équipements de haute technologie et des instruments scientifiques de pointe. Son moteur ionique, par exemple, fonctionne en expulsant de manière continue un faisceau de particules chargées, ou « ions », qui produisent une poussée propulsant le satellite vers l'avant. L'énergie nécessaire pour alimenter le moteur est fournie par des panneaux solaires, d'où le qualificatif « hélioélectrique » utilisé pour ce mode de propulsion. Ce moteur génère ainsi une impulsion très douce qui déplace le véhicule de manière relativement lente : SMART-1 accélère d'à peine 0,2 mm/s2, poussée équivalente au poids d'une carte postale.

Pour toutes ces raisons, le voyage de SMART-1 vers la Lune n'a été ni rapide ni direct. L'ESA souhaitait en effet tester pour la première fois la propulsion électrique au cours d'une mission comparable à un voyage interplanétaire. Après son lancement, le satellite s'est placé sur une orbite elliptique autour de la Terre. Il a ensuite allumé son moteur ionique pour élargir graduellement son orbite elliptique et se diriger vers le plan orbital lunaire selon une trajectoire en spirale.

Mois après mois, SMART-1 s'est ainsi rapproché de la Lune. Sa trajectoire en spirale l'a entraîné dans un périple de plus de 100 millions de kilomètres, alors que la Lune n'est distante de la Terre, en ligne droite, que de 350 000 à 400 000 km !

En approchant de sa destination, SMART-1 a commencé à utiliser la gravité lunaire afin de se mettre en position d'être capturé par le champ gravitationnel de la Lune, ce qui s'est produit en novembre 2004. Après sa capture, SMART-1 a commencé à suivre une trajectoire en spirale pour atteindre, en janvier 2005, son orbite polaire elliptique opérationnelle finale, avec un périlune (distance la plus proche de la surface lunaire) à 300 km et un apolune (distance la plus éloignée) à 3 000 km, ce qui lui a permis d'entamer sa mission d'exploration scientifique.

Qu'y avait-il à apprendre de nouveau ?

Malgré le grand nombre de véhicules spatiaux qui ont exploré la Lune, bien des questions scientifiques concernant notre satellite naturel sont demeurées sans réponse, comme celles qui portent sur l'origine de la Lune et son évolution, notamment les phénomènes qui façonnent les corps célestes rocheux (tectonique, volcanisme, impacts, érosion,.).

Grâce à SMART-1, les scientifiques européens et du monde entier disposent aujourd'hui d'images de la surface de la Lune présentant une résolution encore jamais obtenue depuis une orbite lunaire, et peuvent ainsi également améliorer leurs connaissances des minéraux lunaires. Pour la première fois, ils ont pu détecter du calcium et du magnésium au moyen d'un instrument fonctionnant dans le rayonnement X. Ils ont mesuré les différences de composition du sol au niveau des pics centraux des cratères, des plaines volcaniques et des gigantesques bassins d'impact. SMART-1 a également étudié des cratères d'impact, des éléments du relief volcanique et des tubes de lave, sans oublier les régions polaires. De plus, la sonde a découvert, à proximité du pôle nord, une zone éclairée en permanence par le Soleil, même en hiver.

Le survol des pôles de la Lune a permis à SMART-1 de cartographier l'ensemble de la surface lunaire, y compris celle, moins connue, de sa face cachée. Les pôles présentent un intérêt particulier pour les chercheurs car ils demeurent relativement inexplorés. De plus, certaines formations des régions polaires ont une histoire géologique différente de celle des régions équatoriales, qui ont été davantage étudiées car c'est là où se sont posés tous les atterrisseurs lunaires précédents.

Grâce à SMART-1, l'Europe joue un rôle actif dans la mise en place du futur programme international d'exploration lunaire et y apporte une importante contribution par l'intermédiaire des données collectées au cours de la mission. Ces données ainsi que l'expérience acquise contribuent également à la préparation de futures missions lunaires, comme le projet indien Chandrayaan-1, qui réutilisera les spectromètres dans l'infrarouge et le rayonnement X de SMART-1.

SMART-1 est équipé d'instruments entièrement nouveaux, jamais utilisés à proximité de la Lune. Il s'agit notamment d'une caméra miniaturisée et de spectromètres dans l'infrarouge et le rayonnement X, destinés à mieux observer et à étudier la Lune.

Les panneaux solaires de SMART-1 utilisent des photopiles à l'arséniure de gallium, qui ont été préférées aux photopiles traditionnelles au silicium. OBAN, l'une des expériences embarquées, a servi à tester un nouveau système de navigation qui permettra à de futurs véhicules spatiaux de naviguer de manière autonome, sans intervention des installations de contrôle au sol.

Les instruments et les techniques expérimentés à bord de SMART-1 pour étudier la Lune faciliteront ultérieurement la mission BepiColombo de l'ESA, qui ira explorer la planète Mercure.

© Agence spatiale européenne


  Lieu d'impact de SMART-1

Lieu d'impact de SMART-1

Crédits ESA / Space-X (Space Exploration Institute)
 

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